Moi, Napoléon – #3 Premier Consul

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D'Ajaccio à Waterloo, de son sacre à son exil à Saint-Hélène, le plus célèbre des empereurs français se raconte. Une série audio librement adaptée du roman graphique « Moi, Napoléon », édité par Unique Héritage Editions, a retrouvé dès le 7 avril 2021 dans toutes les bonnes librairies.

À mon retour d'Égypte, la situation est propice aux initiatives les plus audacieuses. Le directoire, sans réelle direction ni vrai dirigeant, est une pétaudière en proie à toutes les vicissitudes et soufflées, tiraillées entre les harangues faubourgiennes des Jacobins et les ronflements de la bourgeoisie libérale, sans parler des royalistes en embuscade qui ourdissent l'arrivée de Louis XVIII sur le trône. Quant à moi, j'incarne l'énergie révolutionnaire tout en présentant le visage rassurant de l'ordre, une sorte de Robespierre beauté. Ma réputation est formidable et mes mains sont encore vierges de toutes les salissures de la politique. J'apparais alors comme une solution. CIS a déjà tout manigancé. Après avoir obtenu la démission du directeur Baras grâce à Talrand et rallié le Conseil des Anciens à notre cause, il espère obtenir de la seconde assemblée législative le Conseil des 500, une refonte du pouvoir autour d'un gouvernement plus resserré. Le plan est simple, mais risqué. Il s'agit d'agiter la menace d'un complot anarchiste pour éloigner de Paris le Conseil à Saint-Cloud et opérer ce changement en catimini.

CIS, qui se pique de droits constitutionnels, se veut la tête pensante de l'opération, mais il a besoin d'un bras armé pour assurer ses arrières. J'offre donc mon sabre, lors de ces deux journées historiques, les 18 et 19 brumaire de l'an 8. Les députés sont rassemblés dans le rongerie du château de Saint-Cloud sous la présidence de mon frère Lucien pour galvaniser les hommes et les assurer de mes bonnes intentions. Il n'hésite pas à se déclarer prêt à me percer le sein avec un poignard en cas de trahison. Quelle scène. Mais devant le piétinement des négociations, le risque d'être déclaré hors la loi et de finir sur l'échafaud, je prends l'initiative d'envahir la salle, à ma manière, la seule qui vaille à la usarde.

« Foutez-moi tout ce monde dehors! » s'écrit ce bon Murat. À la tête des soldats, baïonnette au canon. La confusion et la panique s'emparent des députés, qui s'enfuient par la fenêtre à qui mieux mieux. Je transforme ainsi ce coup d'État parlementaire en coup d'État militaire. La révolution est sauvée, ou plutôt, elle est achevée.

Le soir même, une cinquantaine de députés dociles, qui voulaient pourtant nous trucider quelques heures plus tôt, déclarent que nous avons bien mérité de la patrie et nomment une commission consulaire, exécutive, tricéphale, composée de siéness, de Ducot et de votre serviteur. Le consulat est . Me voici consul, le citoyen premier consul de la République.

Je dois vite me mettre au travail, car il y a péril en la demeure. Tout est à réformer, à refaire, pour ainsi dire. Les Français sentent le besoin d'un gouvernement fort, après le tumulte de temps damné si instable. Il est grand temps de mettre un terme à cette pagaille parlementaire et un peu d'ordre entre toutes ces factions d'idéologues qui tiraillent cette pauvre France comme des chiffonniers. Je m'entoure d'hommes de toute obédience, comme Macérès à la justice, Fouché à la police et Talrand, cet homme de tous les vices à la diplomatie. Les anciens terroristes coopèrent avec les princes. La réconciliation nationale est le premier tour de force de mon mandat. Voici venu le temps des réformes. Abouti, achevé, accompli.

Je doc les départements de préfets, les districts deviennent des arrondissements, le canton est créé. À chaque échelon territorial, j'irai la France d'une administration saine, grâce à des hommes honnêtes et compétents. J'ai la conviction que les administrateurs doivent être indépendants de leurs administrés et dévoués au service de l'État plutôt qu'à leurs intérêts électoraux. Ainsi, les impôts entrent enfin dans les caisses de l'État, demeurés vides pendant trop d'années. Je crée la Cour des comptes et fonde la Banque de France, à qui j'accorde le privilège d'émettre des billets plus faciles à faire circuler que l'or et l'argent. Avec le Concordat, je finance le culte et rétablie les droits de l'Église catholique persécutée depuis la terreur. Je pacifie encore le pays, enlevant le bannissement des aristocrates émigrés. Les principaux laids de la Révolution sont sauvés, et la France est apaisée. Je couronne toutes ces réformes d'un corpus législatif inédit, ma vraie gloire, plus précieuse que n'importe quelle victoire sur les champs de bataille, une gloire que rien n'effacera et qui vivra éternellement, c'est mon code civil. La paix à l'intérieur précède la paix à l'extérieur, grâce à la victoire décisive de Marengo. En un monde laquelle j'ai surpris les Autrichiens franchissant le col du Saint Bernard dans les Alpes, avec toute mon armée, comme j'a dit Sanibal, avec ses éléphants, l'Angleterre, bon en malent, est contrainte à la paix, que je déclare au monde, c'est le traité d'Amiens. Il est un terme aux guerres qui enflammaient les frontières françaises depuis dix ans. Le soulagement est immense, la France redevient riche et prospère, ma volonté inflexible a permis ce miracle, je suis l'homme de la Providence. En reconnaissance, les Français me nomment consul à vie. Ce soir-là je suis fourbu, presque terrassé par une journée de travail harassante. Nous sommes le 3 Nivôse, an 9 de la République soie, le 24 décembre 1800. Je n'avais qu'une envie pour cette veillée de Noël, celle de dormir à point fermé, mais Josephine et ma belle-fille Hortense insistent pour que nous nous rendions à l'opéra afin d'assister à la première de l'oratorio de Haydn. À contre-cœur, je cède à ce caprice, je monte dans le carrosse, accompagné du général Lannes et du ministre de la guerre, Berthier, qui précèdent un détachement de grenadiers. Tandis que nous nous engageons rue Sainte-Honorée, dans mes songes évanescent, je me remémore la sévère répression au canon des royalistes sur les marches de l'église Saint-Roch. Funeste réminiscence et sain mot réprésage.

Quelques instants après, une sorte de machine infernale, dissimulée dans une charrette de marchandises, explose en un fracas de tous les diables, au point de pulvériser les maisons environnantes. On dénombre une vingtaine de morts et une centaine de blessés, mais pas celui que l'on visait. Je suis sain et sauf. Comme si de rien n'était, je me rends quand même à l'opéra, impassible, pour montrer aux français que rien ne peut m'atteindre. Mais en moi-même, je boue, je fulmine, j'enrage.

Couché subodeur quelques complots royalistes, mais je suis convaincu que les anarchistes sont derrière cet attentat. Leur malignance avait été avérée quelques semaines auparavant, et ils digèrent fort mal cette prétendue tyrannie que d'aucuns n'appellent ouvertement à poignarder.

J'ai beau avoir pacifié la France, mes ennemis ne peuvent se résoudre à voir au moins autre chose qu'une transition. Hélas pour eux, je ne suis ni Cromwell, ni Manc, et ces bruts au petit pied connaîtront le prix de ma colère. Peu importe qui est coupable. Cet attentat est une aubaine, pour faire le ménage, je frappe les factions sans ménagement, coup sur coup. Les Jacobins suspectés de conspiration sont exécutés ou déportés. Quant aux royalistes, dont la responsabilité est prouvée quelques temps après, je méfie leur espoir de restauration. Georges Cadoudal, l'intrepide chef-chuant, et ses conjurés sont capturés et guillotinés. Je vais même jusqu'à faire enlever le duc d'Angain au-delà des frontières françaises. Épilogue de cette horrible attentat, l'arrestation de ce prince de sang de la maison de France, le dernier bourbon de la branche Condée, le propre cousin de Louis XVI, indigne toute l'Europe, qui voit au moins un assassin.

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