Je crois que ce qui est unique pour le savant, c'est qu'il lui faut non seulement chercher la vérité, mais la proclamer.
Je crois pouvoir vous dire, je crois devoir vous dire, même que l'émission à laquelle vous allez assister ce soir n'est pas une émission comme les autres.
Sans doute vous attendiez cela déjà à propos d'autres émissions, mais ce soir seulement c'est vrai.
Ça n'est pas une émission comme les autres, et voici pourquoi.
D'abord, c'est parce que l'homme qui est en ce moment à côté de moi, que vous allez voir dans quelques instants et que j'ai ce soir le redoutable et intimidant honneur de vous présenter, n'est pas un homme comme les autres.
C'est, en effet, le professeur Robert Oppenheimer, dont je n'ai pas besoin de vous rappeler.
J'imagine qu'il est le père de la bombe atomique, de la bombe A, et qu'à ce titre, c'est lui qui a ouvert cette ère atomique, cet âge atomique, qui sans doute pendant longtemps encore nous plongera alternativement dans l'angoisse et dans l'espoir.
Oppenheimer a régné sur la première grande cité atomique de Los Alamos et il dirige aujourd'hui aux Etats-Unis une université qui elle non plus n'est pas comme les autres qui est l'Institut des études avancées de Princeton.
Une autre raison fait aussi que cette émission de ce soir n'est pas comme les autres, c'est que depuis son séjour en France, qui dure depuis plusieurs semaines, Robert Oppenheimer s'est dérobé à tous les interviews que la presse lui a demandées.
Et cela donne un prix d'autant plus grand à sa présence ce soir devant les caméras de la télévision française, alors qu'il est à la veille de son départ à nouveau pour les Etats-Unis.