La philosophie nous aide parce qu'elle réouvre les perspectives.
Il faut penser que la mort, c'est un départ, et la difficulté de tout départ, c'est de se dire au revoir et de parvenir jusqu'à ce moment où on a l'impression de s'être tout dit.
Et la difficulté avec les parents, et par exemple avec sa mère, c'est qu'on n'aura jamais tout dit.
Donc toute la difficulté, c'est de savoir s'accompagner autrement que en cherchant à tout dire.
Et ce qui est intéressant, c'est que, par exemple, dans le grand âge, les personnes qui vieillissent, peut-être en perdant certaines facultés cognitives, vont nous amener à nous concentrer sur d'autres manières de communiquer.
On voit les personnes âgées se concentrer sur des choses qui nous étonnent, un rayon de soleil, une ombre, la chaleur de la purée dans laquelle ils mettent les mains.
Et on les interprète souvent comme des attitudes régressives, c'est-à-dire de retour à l'état du nourrisson.
Ce que j'essaye de montrer dans Parler avec sa mère, c'est qu'en fait, ce sont des territoires existentiels à explorer ensemble.
Et donc si, au lieu de déplorer sans cesse le vieillissement de nos aînés, et d'être triste de ne plus reconnaître les personnes et de se référer sans cesse au passé, si au lieu d'avoir cette attitude que j'appelle le déclinisme, on se contente sur ce que les gens apprennent et nous montrent, nous apprennent à apprendre, eh bien en fait, on découvre de nouvelles zones.
De rencontre où on peut être ensemble d'une autre manière, peut-être que la conversation sera moins intéressante, mais la sensation d'être présent ensemble sera plus intense.